D’une planification stratégique vertueuse à une gouvernance source d’interactivités

11/08/21 | Chronique de l’aménagement urbain

Définir les orientations de planification stratégique des SCOT et PLU nécessite un consensus général

Par Bernard LENSEL, Eric RAIMONDEAU et Ismaël SYLLA, Urbanistes des Territoires.

Publié dans la revue Ingénierie Territoriale N°65/Juillet/Août 2021

Depuis la loi Solidarité et Renouvellement Urbain (SRU) de décembre 2000, le document d’urbanisme le plus connu des Français est le Plan Local d’Urbanisme (PLU). Le Schéma de Cohérence Territoriale (SCOT) s’impose en amont comme un document stratégique incontournable aux acteurs chargés de l’urbanisme. L’élaboration et la gestion de ces deux documents donnent lieu à des procédures ou apparaissent souvent des divergences entre élus. Or, les orientations stratégiques d’un SCOT, qui devront être prises en compte dans un PLU à l’échelle d’un territoire communal, intercommunal ou métropolitain, ne peuvent se définir que dans un consensus général.

Planification urbaine et aménagement du territoire,

Le POS fixait des règles plutôt rigides pour gérer l’instruction des permis de construire. Elles déterminaient des volumes de construction, des emprises de voierie. Le POS permettait plutôt la mise en œuvre d’un urbanisme de zonage concrétisant l’urbanisme fonctionnaliste

Ainsi, une construction ne pouvait s’implanter que dans un cadre strict dont il était difficile de s’écarter.

La loi Solidarité et Renouvellement Urbain (SRU) du 13 décembre 2000 a défini un nouveau paradigme de l’urbanisme qui évolue sous les contraintes climatiques et environnementales.

Le PLU(i), grandeur et servitudes,

Le PLU est devenu l’expression même du projet urbain d’une collectivité. Ce changement va donc bien au-delà du simple symbole : le Projet d’Aménagement et de Développement Durable (PADD) doit exprimer clairement un projet politique des élus dans l’acte de planification pour les 10 ans à venir.

Désormais c’est le projet qui fait la règle tout en prenant en compte la mixité sociale des usages et des fonctions.

La loi SRU a aussi fait disparaitre l’urbanisme dérogatoire du Plan d’Aménagement de Zone (PAZ) à l’intérieur des Zones d’Aménagement Concerté dans lesquelles s’appliquent désormais le PLU.

La priorité c’est de reconstruire la ville sur la ville par la densification des tissus urbains existants ou des nouveaux quartiers de ville créés pour lutter contre l’étalement urbain.

La mixité sociale est aussi au cœur des préoccupations puisqu’un minimum de 25% de logement social est imposé à l’intérieur de chaque commune.

La dimension intercommunale du PLUi peut apporter une vision plus continue des territoires traités.

Ainsi nous passons d’une densité normative à une densification intelligente, qui intègre la mobilité, le logement social, les trames vertes et bleues, la prise en compte des spécificités des quartiers et qui induit une véritable « intensité urbaine » [1]

Le SCOT garant de la cohérence des orientations d’aménagement 

A l’échelle d’un territoire plus large, d’un bassin de vie, le Schéma de Cohérence Territorial (SCOT) constitue la pièce maîtresse pour coordonner les politiques publiques et les orientations voulues sur un bassin de vie.

Il est devenu intégrateur des politiques publiques d’aménagement des collectivités et de l’Etat sur un territoire beaucoup plus vaste que celui d’un PLU ou d’un PLUi auquel il s’impose.

Le Projet d’Aménagement Stratégique fixe des orientations et des objectifs d’aménagement sur vingt ans.

Le Document d’Orientation et d’Objectifs s’articule désormais autour de trois grands thèmes que sont :

  • Le développement économique,
  • Le logement, l’habitat, les grands équipements, les mobilités/déplacements,
  • La transition écologique et énergétique, la biodiversité, les risques naturels et technologiques.

Le SCOT vaut Plan Climat Air Energie Territorial si les collectivités délèguent cette compétence au SCOT afin de mettre en cohérence les actions nécessaires pour contrecarrer le réchauffement climatique sur un périmètre beaucoup plus large que celui d’une commune, afin d’amplifier l’efficience des mesures à prendre.

Par la dimension intégratrice des politiques publiques et orientations du SCOT (DTADD SRADETT) l’élaboration ou la révision d’un PLU(I) est facilitée globalement « l’élaboration d’un PLU s’en trouve simplifiée puisqu’il devra uniquement examiner sa compatibilité avec le SCOT et non plus avec tous les autres documents et de ce fait, sa compatibilité sera à examiner uniquement avec le SCOT et non plus avec tous les autres documents » [2] 

L’interaction entre SCOT et PLU se trouve donc considérablement renforcée, même si ces documents font l’objet de procédures spécifiques.

Le projet par la planification.

Le SCOT et le PLU ont subi de profondes modifications pour assurer pleinement leurs rôles de documents prescripteurs pour l’aménagement durable des territoires sur des échelles de territoires différentes.

Depuis 2016, l’Orientation d’Aménagement et de Programmation est consacrée comme dispositif permettant la traduction d’un projet de territoire. Ce type de documents existe depuis longtemps dans des pays voisins, comme l’Allemagne et la Confédération suisse, mais les OAP françaises ont apporté une plus grande diversité d’approche.

Il existe plusieurs types d’OAP :

  • Les OAP sectorielles
  • Les OAP patrimoniales
  • Les OAP d’aménagement
  • Les OAP valant règlement

L’OAP de secteur d’aménagement (ou sans règlement) définit des Orientations applicables à un secteur sans tenir compte forcément des dispositions du règlement sous réserve de disposer d’un « schéma d’aménagement qui précise les principales caractéristiques d’organisation spatiale du secteur ».

Il en résulte une grande liberté dans la réflexion du projet à mettre en œuvre II doit cependant être compatible avec les orientations du PADD du PLU/PLUi.

Densification, mixité sociale, diversité des fonctions, lutte contre l’étalement urbain, lutte contre l’artificialisation des sols sont les principales thématiques qui sont montées progressivement en puissance au cours de ces vingt dernières années tout protégeant la biodiversité et en luttant contre le réchauffement climatique.

Comme le dit Laurent THERY, Grand prix de l’urbanisme 2010 : Des projets souples et évolutifs doivent bien sûr être respectueux des règles et procédures en vigueur mais dans une logique où celles-ci servent les conditions d’un projet débattu, validé et non comme un cadre rigide où les procédures tendraient à corseter la matière même du projet.(….)Il ne s’agit pas d’un plaidoyer contre la règle mais du souhait d’approfondir, de diffuser la culture du projet urbain comme une capacité à concevoir des règles souples et révisables, des normes nécessaires mais appuyées sur des méthodes et des démarches.

La gouvernance territoriale :

Le SCOT est élaboré soit par des Etablissements Publics de Coopération Intercommunale (EPCI), soit des Pôles d’Equilibre Territorial et Rural (PETR), soit des syndicats mixtes, …

Les PLU eux le sont soit par des communes, soit par des EPCI dont la compétence urbanisme est obligatoire, soit par des EPCI pour lesquels les communes ont accepté de la leur transférer.

Pour les SCOT, les discussions entre collectivités sont souvent, au-delà des clivages politiques, consensuels sur des orientations de portée générale sur les grandes thématiques à mettre en œuvre.

Pour les PLU intercommunaux la relation entre collectivités et élus est beaucoup plus complexe. La ville-centre prend souvent en charge la procédure en utilisant son influence. Elle impose souvent ses vues aux autres communes. Un centralisme à l’échelle locale apparaît alors clairement et peut déséquilibrer le développement harmonieux du territoire de l’intercommunalité.

L’intercommunalité fixe des objectifs dont la réalisation peut s’avérer difficilement atteignables pour la commune.

Lire aussi : pour une mobilité raisonnée : parue dans la revue Urbanisme N°418

Si par exemple les objectifs d’un Plan Local de l’Habitat (PLH) sont trop ambitieux, cela amènera la collectivité à devoir construire des équipements publics pour répondre aux besoins de la population et donc grevé son budget.

Reste que, faire partie d’une intercommunalité permet de disposer d’une ingénierie, d’une expertise et d’un savoir-faire. C’est aussi une mutualisation des moyens humains, et donc une optimisation des coûts d’études souvent élevés, d’autant plus que les dotations de l’Etat pour conduire ces procédures s’amenuisent comme peau de chagrin.

Il apparaît donc nécessaire que l’élaboration d’un PLU (I) et celle d’un SCOT puisse être concomitantes afin de mieux s’alimenter, entre échelles ascendantes et descendantes : cela permet de bénéficier de l’expérience du terrain, de rectifier d’éventuelles inadéquations techniques et de s’inscrire ainsi dans une réelle interactivité pour mettre en cohérence les politiques publiques en termes d’aménagement dont les collectivités ont la charge.

Aout 2021

[1] Intensités urbaines, Revue URBIA N°9, décembre 2009, Lausanne, Réflexion menée par le Pr Antonio DA CUNHA

2 Extrait du rapport au Président de la république, relatif à l’ordonnance n°202-745 du 17 juin 2020


 

 

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Eric RAIMONDEAU

Eric RAIMONDEAU

Gérant de l'agence UTOPIES URBAINES

J’ai créé l’agence Utopies Urbainespour partager mon expertise et la transmettre au travers des expériences que j’ai pu acquérir en direction des élus locaux mais aussi  des fonctionnaires des communes ou intercommunalités lors de sessions de la formation continue ou initiale. Ce site veut aussi être un relais pour des offres d’emploi proposées par les collectivités territoriales.

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